

Pour des raisons d’ordre familial, je n’ai pu honorer notre rendez-vous du premier samedi du mois, la semaine dernière. Je vous demande de bien vouloir m’en excuser. Pour ce motif, mon propos pourrait paraître décalé car le mois de janvier s’éloigne. Et pourtant, il sera désormais toujours d’actualité. Où étais-je le dimanche 11 janvier ? Où pouvais-je bien être, moi qui, depuis trente ans, tiens un stylo à la main pour m’exprimer librement dans diverses publications ? J’étais évidemment sur la Place de Fouesnant, pour dire non aux ennemis de la liberté qui ne supportent pas qu’on puisse penser différemment qu’eux et qui, pour cette SEULE raison, avaient assassiné des journalistes et des employés de « Charlie Hebdo », des policiers, des clients d’un magasin juif. Je n’étais (et ne suis) pas un inconditionnel de « Charlie » que je feuillète à l’occasion. J’imagine que c’était le cas de la plupart des millions de personnes qui se sont rassemblés dans tout le pays. Sinon, comment expliquer que le magazine était aux abois financièrement et se retrouvait en situation de survie. Mais un pas avait été franchi. J’étais là pour dire non aux ennemis de la République et de la démocratie, pour défendre ce « bien vivre ensemble » qui est la base même de notre société. « Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites mais je me battrai jusqu’au bout pour que vous puissiez le dire ». Une phrase attribuée (à tort, semble-t-il) à Voltaire.
Tout est là. Reste à savoir où commence l’intolérable, mais c’est un autre débat. On me dira : pourquoi respecter ces journalistes qui ne respectaient rien, qui se moquaient de tout ? Pour une raison, à mon sens. Parce qu’ils savaient qu’en s’attaquant au Prophète, ils mettaient leur vie en danger. Et ils ont refusé de se coucher comme beaucoup d’autres l’ont fait. « Mourir pour l’idée, c’est la seule façon d’être à la hauteur de l’idée » dit Camus dans « Les Justes ». En écrivant ces lignes, je ne peux m’empêcher de penser aux sept moines de Tibhirine, lâchement assassinés (par les islamistes ? par l’armée algérienne ?) en 1996. Eux aussi se savaient en danger mais, chrétiens, ils avaient refusé de partir, portés par leur idéal d’amour et de partage, pour continuer à soigner leurs frères musulmans. J’aurais aimé que les responsables politiques de tout bord, les médias influents, les intellectuels de service appellent à descendre dans la rue pour former aussi une marée humaine révoltée. Rien (ou si peu) ne fut fait. Décidément, je n’arrive pas à m’habituer à ce politiquement correct qui accouche la plupart du temps d’indignations sélectives.
Donc, le dimanche 11 janvier, j’étais à Fouesnant pour un court et sobre rassemblement. Nous étions plus de 2000 sur la Place de la Mairie ou, plus exactement, sur la Place du Général De Gaulle, comme le fit justement remarquer Roger Le Goff. Histoire de rappeler que la liberté a un prix. Le maire de Fouesnant était entouré de ceux de Pleuven, de Saint-Evarzec et de Clohars-Fouesnant. Cherchez l’erreur. Il y a bien sept communes dans la Communauté de communes du Pays Fouesnantais, non ? Et bien, figurez-vous que La Forêt-Fouesnant, Bénodet et Gouesnac’h avaient décidé d’organiser leur propre rassemblement à l’ombre de leur clocher. Absence de volonté politique de mettre en avant la structure intercommunale ? Ego surdimensionnés ? On me dit que tout se fit dans l’improvisation. Cela n’empêcha pas, en revanche, quelque 50 chefs d’États étrangers de se retrouver à Paris, le même jour. Depuis, on ne cesse de nous parler d’un ambitieux projet de territoire (133 000 000 € ! ) qui conditionnera l’avenir du Pays Fouesnantais jusqu’en 2020.
Rappelez-vous, camarades, que c’est dans les moments difficiles qu’on se serre les coudes et qu’on légitime ainsi sa volonté de vivre ensemble.
JYLD
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