Expert européen en art aborigène, anthropologue par hasard, Marc Yvonnou tient une galerie à Pont-Aven. La semaine dernière, il organisait une visite guidée au Musée du Quai Branly, à Paris.
Marc Yvonnou aux côtés du très grand artiste aborigène, George Ward Tjungurrayi.

Son nom de peau est «Tjakamar», patronyme aborigène qui le soude à la communauté du même nom. C'est un artiste peintre natif du bush qui l'a adoubé. Depuis bientôt 20 ans, Marc Yvonnou arpente en 4x4 les milliers d'hectares d'une terre australienne épuisée par la chaleur. Alors forcément, il est connu comme le loup blanc par les autochtones. Des autochtones reconnus pour leur génie artistique.
Volontiers iconoclaste
Marc Yvonnou fut sans doute l'un des derniers bébés à naître en Ville close. Preuve incontestable de ses origines concarnoises. Son goût pour la peinture, pour l'art en général, lui vient de ses grands-parents qu'il accompagnait dans les salles d'exposition. «J'ai acheté ma première toile à 14 ans», se souvient-il. «Déjà à l'époque, je voulais devenir galeriste». Marc Yvonnou n'est pas un homme de sérail. Il se dit même volontiers iconoclaste. Mais un iconoclaste curieux de tout. De spiritualité notamment, et cela, dès sa plus tendre enfance. Sa maîtrise de droit et de gestion en poche, le jeune homme hésite sur son avenir. Il choisit la filière commerce par défaut, parce qu'un diplôme d'histoire de l'art mène tout droit à Pôle Emploi.
Anti-Indiana Jones
Après quelques pas effectués dans la vente de bagues, il décide de revenir à ses premières amours. Il ouvre à Pont-Aven une galerie spécialisée dans l'art aborigène. L'art du pointillé et du sacré l'émeut au plus haut point. Il lit quantité d'ouvrages en langue anglaise, contacte l'ambassade d'Australie. Car il ne se contentera pas d'exposer et de vendre. Marc Yvonnou n'est pas un simple marchand. Il ira chercher les artistes là où ils vivent. Il veut découvrir l'environnement de leur génie créateur. Casanier assumé, celui qui se dit volontiers l'anti-Indiana Jones change de garde-robe et, accompagné d'un guide, traverse «des endroits où aucun Blanc ne met jamais les pieds. Car, oui, le bush est formidablement dangereux. Il est infesté de serpents et de scorpions qui donnent la mort à coup sûr», indique-t-il sans esbroufe.
Des aborigènes moqueurs
Aujourd'hui, l'expert ès art aborigène et anthropologue se promène, comme chez lui, au coeur du continent australien. Parfois en 4x4, parfois à bord d'un petit coucou. À mille milles de tout secteur urbanisé. Au fil des années, Marc Yvonnou a découvert un peuple qui, petit à petit, perd sa culture. «Je suis conscient d'être au contact de génies qui ont connu l'âge de pierre». Un peuple affaibli par les mauvais produits alimentaires, cantonné dans des réserves. Mais qui n'a pas perdu son sens de l'humour. «On ne sait jamais quand ils se moquent de nous», apprécie le Concarnois. «Nous n'avons pas la même structure mentale. Ils vivent au jour le jour, n'ont aucun besoin matériel. Ils mettent en commun leurs biens qu'ils dilapident en bêtises. Or les toiles des artistes les plus connus s'achètent à des centaines de milliers d'euros», regrette-t-il.
Le Musée des arts premiers
La semaine dernière, le galeriste de Pont-Aven organisait une visite guidée au Musée du Quai Branly.
Une visite privée pour dames riches de Paris. Et dans quelques jours, il revêtira à nouveau sa tenue anti-Indiana Jones,
afin de retrouver... ses frères de peau.